JEAN-LOUIS MURAT « GRAND LIEVRE » (1)

20 septembre 2011. 19h45. Hôtel Les Jardins du Marais, dans le 11e arrondissement de Paris. « Il est beau quand même », me lance l’attachée de presse alors qu’elle scotche tête la première dans le numéro des Inrocks de septembre/octobre 1991. « Il est beau » dit-elle, attendant l’écho d’un « J’avoue », alors qu’elle scrute la mine de triste sire tout en sourcils froncés style Ken le Survivant d’Auvergne de ce lover qu’est JLM. « Et c’est beau » poursuit-elle, considérant l’objet. Ses photos. Ses textes. Sa taille. Ses pubs pour l’alcool et le tabac. L’impression qu’elle évolue soudain dans un vaisseau spatial. Vole. Et oui, elle a quoi la fille, 25 à tout casser ? Comme moi elle n’a pas connu tout ça. Et comme moi, avant que je ne rattrape le temps perdu, elle hallucine. Comme si elle découvrait enfin le vinyle après une vie d’MP3 et de streaming. Et c’est vrai qu’ils sont beaux Les Inrocks et le Murat d’il y a 20 piges. Quand ils nous parlaient du monde intérieur, l’un proposant des interviews-fleuves en citant Tati (« Trop de couleurs distrait le spectateur »), l’autre Le Manteau de pluie en citant Cohen (« Did you ever go clear ? »). Le spectacle a plu.

Et ce n’est pas un hasard si on revoit aujourd’hui cette figure dans les couloirs du métro parisien. Si des affiches la ravivent et qu’elle s’y dresse, cheveux au vent et regard horizon, telle un phare, caban hussard et belle gueule de Bresse Bleu meurtri à la Corto Maltese / Olivier de Kersauson. Pas un hasard. Le Murat de 2011, ce Grand Lièvre qui sort le 26 septembre suivi d’un concert le 10 novembre au Trianon, est beau. A bientôt 60 ans (le 28 janvier 2012) après 31 ans de service, dont 11 à produire du bof comme vache qui pisse (11 disques), Murat semble avoir fait mouche. Après avoir lettré comme Bashung (mais sans paroliers) et Dominique A (mais bien avant lui), le néant du rock français, il semble atteindre son nouveau but : ne plus sonner synth-nitouche mais conquérir le son de la chose. Que la « crinière pousse enfin au lionceau », comme il le formulait déjà en 84 dans « Johnny Frenchman » (Passions Privées). Et là sur ce Grand Lièvre enregistré en quelques jours sur un magnéto 24 pistes avec Fred Jimenez (basse) et Stéphane Renaud (batterie) qui l’accompagnent depuis 2002 et avec le pianiste Slim Batteux, ça se produit.

Grand Lièvre ? Du « Murat au sommet » à « savourer avec de grandes oreilles » dit la bio du disque. Le genre de phrases que j’abhorre. La musique se réduit-elle à un phénomène de coton-tige entre vous et vos oreilles ? Non, la musique ne fait pas « du bien aux oreilles » ni « aux esgourdes », c’est une sidération du bonhomme. Et ce n’est pas parce que Murat débouche, à force de cultiver ses song(e)s of l’Auvergne être, sur ce que je nommerai là un « bon cru », si je me laissais aller aux métaphores viticoles, qu’il a perdu l’âme. Il sonne même l’avoir retrouvée. Ce grain. Ce vieil imperméable. « Qu’est-ce que ça veut dire ? » chante-t-il sur le splendide morceau d’ouverture. Auquel répond le disharmonique « Je voudrais me perdre de vue » au cœur du disque. Un Murat toujours paumé donc. Mais un Murat en grande forme, forever Young. Qui avec ce Grand Lièvre au son chaud et souple tout en profondeur de champ, plus que sur son précédent disque enregistré à Nashville Tennessee (Le Cours ordinaire des choses), fait à nouveau ressentir le far west en lui. Sa grande santé. Alors le far west en nous revit. Grand Lièvre ? Beau fix(e). Le show continue.

 

« ça m’a jamais plu d’être défini comme un chanteur à texte »

 

 

Bonjour Jean-Louis. Je vous ai apporté quelques Madeleines de Proust…

Ah ouais ?

Oui, sous la forme de ces vieilles archives personnelles…

(Il saisit l’Inrocks que j’ai tiré de mon sac, celui de septembre/octobre 1991 dont il faisait la couv et zieute les 10 pages qui lui étaient consacrées pour la sortie du Manteau de pluie.) Oula, putain, j’étais de mauvaise humeur et j’étais déjà pas coiffé quoi (rires) !

Un bon souvenir ?

Je les avais tous les trois à la maison. Fevret (Christian, directeur de la rédaction), Beauvallet (Jean-Daniel, chef de l’information) et Mulet (Eric, photographe).

Ah oui ? Ils étaient carrément venus à trois ? C’était le convoi, le convoi exceptionnel !

C’est ça. (Il tourne les pages.)

Et puis voilà !

Ah ouais et y’avait Wyatt en plus ! L’ami Robert. Bizarre. (Silence) Ah ouais, t’as ça, toi ?

J’en ai même un autre…

(Il saisit l’Inrock d’avril 1994, où il y a une interview croisée de 7 pages entre lui et je ne sais plus quel écrivain à propos de la campagne.) Ah oui ! Ah oui mais bien sûr, Jean-Loup Trassard ! Je suis un fervent lecteur de Trassard. Depuis longtemps. Bah ouais, tout ça c’était l’époque où on pouvait passer une journée avec le mec et faire des trucs un peu longs, creusés.

Vous lisiez Les Inrocks à cette époque ?

Non. Valait mieux pas. Les gens se seraient dit que je suis trop con vu tout ce que j’ai raconté.

C’est vrai qu’ils vous ont pas mal fait parler à un moment…

Bah ouais, ouais. Pfff, enfin je pense que les autres aussi. (Silence). Oh bah moins maintenant je pense que c’est plus comme ça. Maintenant je passe plus trois heures à discuter pour avoir un papier à la fin. Non, maintenant c’est terminé.

Mais à cette époque avec Les Inrocks et Libé il y avait un vrai suivi…

Ah ouais, à cette époque ça marchait encore.

Il y avait un compagnonnage, vous étiez leur « nouveau page rock » disait Bayon…

Ah ouais ? Olala !

Tellement que Dominique A et Miossec vous envoyaient leurs maquettes…

Ah ouais j’ai eu une période où j’étais submergé, je me suis tapé les premières maquettes de oui, Dominique A, Miossec, des gens qui m’envoyaient musique, dessins, machins, qui me disaient : « Voilà, on aime beaucoup ce que vous faites, on a fait une petite cassette, est-ce que vous pouvez faire quelque chose pour moi ? » Ouais, je dois encore avoir ça quelque part dans mes tiroirs.

Vous avez fait tourner les démos de Dominique A et de Miossec ?

Nan, à l’époque, j’étais un peu branchouille et je vendais, donc j’avais la possibilité d’appuyer des signatures. J’ai fait ça pour Silvain Vanot, ça a marché, mais après les autres se sont très bien démerdés. Nan, plus jamais je m’amuserai à faire ça, c’est un autre job ça. Si tu rentres là-dedans  tu deviens dingue, tu passes ton temps à écouter les autres, appeler les directeurs artistiques. Du coup on m’envoie plus rien (rires) !

Ces journalistes qui vous couvaient, continuent-ils à vous suivre ?

Euh Bayon ouais. Pfff, Beauvallet, Fevret et tout ça je les connais. Je les connaissais même d’avant, quand ils faisaient un fanzine. C’est des gens que je connais super bien. Après on se croise, on se sépare, je sais pas quoi, enfin pfff j’ai jamais spécialement cherché à avoir des amis dans le business moi. Alors on se connait. On se connait. Ils sont fidèles, ils aiment, ils aiment pas, je sais pas. Ils font ce qu’ils veulent. Mais c’est vrai que ce compagnonnage ça, ça a vraiment disparu. Peut-être que ça existe avec d’autres journalistes, mais bon regarde : (il check le sommaire de l’Inrock de septembre/octobre 1991) : Wyatt, Dinosaur Jr., Talk Talk, incroyable quoi ! Et puis y’avait déjà Blur. Han ! Blur, en 91, déjà ! Oh la vache ! Ah ouais.

Toute une génération.

Bah ouais, moi j’ai même travaillé avec Tim-Friese Greene, le producteur de Talk Talk.

Ah oui ?

A la fin ça s’est pas fait parce qu’il partait traverser l’Afrique à pieds. A l’époque y’avait plusieurs mecs comme ça que j’avais contactés. Des groupes comme Prefab. Prefab Sprout. J’ai travaillé avec leur batteur (Neil Conti – nda).

Parce qu’à l’époque vous vouliez sonner entre Talk Talk et Prefab Sprout, c’est ça ?

Ouais, ouais, ouais. Enfin j’étais dans ça, c’était ce que j’aimais à l’époque. C’était ce que je trouvais bien et quand on trouve quelque chose bien on n’a pas envie de faire la même chose mais on a envie de s’en inspirer un peu. Faut mieux s’inspirer de ce qu’on aime bien, hein ? (Il s’étire, baille.) Et puis maintenant je sais pas. Je sais pas comment ça se passe.

Tout est plus fragmenté.

C’est ça, chacun est dans sa niche et ça se mélange pas.

Ahaha, je sais combien vous pouvez être râleur, avec vos positions sur internet, tout ça. C’est marrant parce que lorsqu’on convenait de cette interview avec votre attachée de presse la première chose qu’elle m’a demandé c’est si cette interview serait filmée et moi l’a première chose que j’allais lui préciser c’était que non, elle ne le serait surtout pas !

(Rires) !

Beaucoup ont pu noter que la télévision avait un mauvais effet sur vous, que dès qu’il y a une caméra, hop, une sorte de Murat râleur en diable s’échappe et s’exprime…

Ouais, j’aime pas ça. (Silence) Je sais même pas pourquoi, je sais même pas comment mais j’aime pas ça. Depuis tout petit, j’aime pas ça. J’aime pas être photographie, filmé, j’aime pas. Ça me rend assez agressif. Ouais, ça me rend agressif. (Silence). Je vois pas de quel droit on me photographie ou on me filme. Ça me rend toujours un peu malade (rires légers). Ouais. Mais bon, faut s’enfermer dans des dogmes. Et puis c’est bien d’être diffusé (rires) ! Je vais donc refaire quelques séances photos et, qui sait, peut-être quelques télés.

Y a-t-il des émissions où vous refusez d’aller par principe ?

Bah non, pas vraiment, parce qu’à la télé les émissions et les animateurs ça change tellement. Enfin à part Nagui et Taratata, où je suis interdit de séjour, moi j’ai pas d’a priori.

Taratata ? Pourtant je vous y ai vu une fois, vous y faisiez un duo accordéon-gratte avec une québécoise  (Marie-Joe Therio) et ça envoyait sévère. On le sentait même de derrière l’écran. C’était top.

Ouais, ouais. Bah après j’ai fait un autre truc, il l’a effacé et il l’a jamais rediffusé. Donc voilà, mais sinon ça va. (Silence.) Enfin j’aime pas ça mais je le fais quand même.

Là, vous sortez votre 17e album studio, enfin 17e si j’ai bien compté car ça commence à être dur de comptabiliser, 17e si on enlève les albums live et les EP et autres maxi…

Ouais, je sais pas, on me sort tout le temps des chiffres différents. On m’a dit le 21e, le 24e…

A ce stade est-on encore stressé quand on sort un disque ?

Ouais, l’expérience change rien. C’est là, comme le trac. Ça s’atténue pas.

C’est ce qui aide à continuer ?

Oh non, ça aide pas à continuer, non, non. C’est chiant. Moi ce que j’aime c’est écrire des chansons, enregistrer des albums et il faut bien que j’en vende un peu pour pouvoir continuer ma petite affaire. Alors je fais des efforts, je passe par ce passage obligé.

Votre précédent album s’est-il bien vendu ?

Moi j’ai toujours des ventes pfff très modestes.

Très modeste, c’est quoi ? 30 000 ?

Pfff.

Moins ?

Ouais. 20-25. Comme beaucoup, avec la crise, je suis passé de 300 000 à 30 000.

300 000 c’était à vos débuts ?

Oui, je sais pas, pour Le Manteau de pluie et Dolorès. Après j’ai suivi la pente.

Un zéro en moins !

Même Johnny est passé de 2 millions à 150 000 (rires) !

Oui, mais la qualité son dernier album a fait polémique ! Vous votre dernier album est bon et semble même assez joyeux dans l’ensemble…

C’est ce qu’on me dit. A ma grande surprise. Moi j’avais pas l’impression de faire un truc joyeux. Mais c’est ce que les gens ressentent qui est vrai, moi je sais pas. J’ai un peu de mal à voir. A priori il me semblait sinistre ce disque. Pfff, les textes même de les chanter ça me déprimait.

Pourquoi ça ?

Je pense juste que je suis un dépressif chronique donc j’ai encore fait un disque de dépressif chronique et je me disais : « Oulala ! »

Je pense que l’impression de gaieté du disque vient de sa musique, très pop. J’ai retrouvé dans Grand Lièvre la gouleyance musicale d’A Bird on a poire, la même fluidité, les mêmes fins de morceaux enluminées de chœurs champagne, quelque chose de très immédiat qui fait qu’on se fixe beaucoup moins sur les textes…

Voilà ! C’est ça, oui, oui, oui. C’est-à-dire que ça a été voulu parce que moi j’en ai tellement ras-le-bol que les textes soient trop mis en avant. Sur celui-là je vois bien que ça me fait des vacances parce que ça m’a jamais plu d’être, comme dire, un chanteur à texte. On m’a défini comme ça. Alors si les textes passent au deuxième plan pour moi c’est parfait.

Quand vous dites que c’est « voulu », ça veut dire que depuis un moment vous manœuvriez consciemment dans ce sens-là ?

Non, ça s’est fait lentement mais sûrement. C’est une sorte d’évolution quoi. Et puis le prochain sera encore plus light je pense. Y’aura des textes mais on n’y fera plus attention. C’est-à-dire que je rejoindrai la musique que j’aime. Par exemple quand j’écoute le Creedence je fais pas spécialement attention aux textes.

Cette envie n’est-elle pas aussi liée au fait d’avoir déjà beaucoup dit dans vos albums précédents comme vous avez déjà beaucoup parlé dans vos précédentes interviews ?

Mouais non, je pense juste, j’espère bien, que je fais des progrès, que je comprends des nouvelles choses à chaque nouvel album. J’essaie d’avancer, quoi. J’ai pas dit mon dernier mot. A chaque album je me sens un peu comme un débutant. J’essaie de voir ce qui cloche dans le précédent et j’essaie d’améliorer. C’est pour ça que j’en fais tout le temps. Je vois ça comme une continuité de travail. Là je suis assez content car les textes passent un peu au deuxième plan. Ça fait longtemps que je cherchais ça, mais j’y arrivais pas trop, à part des fois, sur une chanson, de-ci de-là.

Le style de vos textes a pas mal changé avec le temps. N’est-ce pas dû au fait qu’avant vous composiez surtout avec des synthés et que ça induisait un rapport spécifique au texte et au chant, rapport que vous n’avez plus maintenant que vous composez tout à la guitare ?

Ouais, dès que j’ai arrêté les claviers, ce qui fait plus de 10 ans. Les synthés, j’ai jamais aimé ça.

Ah bon ?!

Ouais. Disons que le gros changement c’est Mustango. C’est quand je vais à New York. Là je suis tout seul avec une guitare et je fais ce que je sais vraiment faire, ce que j’aurais dû faire depuis le début d’ailleurs, mais bon, à l’époque j’étais entouré de gens qui avaient des synthés, des boîtes et on se disait : « C’est rigolo, on va faire comme ça »

Alors que vous aviez déjà l’amour des bluesmen, tout ça, Neil Young, Tim Buckley. Pourquoi n’être pas allé directement vers la gratte pure, vous aviez un complexe là-dessus ?

Ouais, un truc de timidité ou de manque de confiance. Là-dessus ce qui a joué c’est d’en avoir pas mal discuté avec Marc Ribot (guitariste et compositeur américain de 56 ans qui a sorti 18 albums entre jazz et rock et collaboré avec Tom Waits, Elvis Costello, John Zorn, Mike Patton, Bashung, Caetano Veloso, Marianne Faitfull, Madeleine Peyroux, etc. – nda) à l’époque de Mustango. Il en avait marre, il m’a dit : « Attends, t’arrête pas de me montrer des trucs que tu veux que je fasse, pourquoi tu les fais pas toi-même ? » Pendant plusieurs jours il m’a bombardé comme ça : « T’as qu’à le faire toi-même ». Et on a fini par enregistrer un titre tous les deux. Face à face. Chacun sa guitare. Mais si j’ai pu faire ça avec Ribot, c’est que c’était bien. En fait le problème c’est la mentalité des musicos français. Avant j’étais pas sûr de moi à la guitare et tu sais comment font les mecs quand t’es pas sûr de toi, ils font : « Han han han ! » Alors moi je rangeais la guitare et je montrais les plans à quelqu’un d’autre. Alors que les américains quand je leur montrais mes plans ils me disaient : « T’es taré, pourquoi tu joues pas ?! » En France t’as jamais un mec qui va te dire : « Pourquoi tu joues pas ? »

Mustango a donc ouvert un nouveau chapitre…

Oui, ça a tout changé. Enregistrer tout ce disque à Tucson avec les deux mecs de Calexico m’a beaucoup donné confiance en moi. Là, avec une guitare acoustique et des musicos, je suis enfin comme j’aime travailler, enfin un peu au cœur du sujet. Après les musiciens new-yorkais m’ont aussi donné confiance en moi. Il fallait absolument que j’en passe par ces deux phases. Après j’ai fait Le Moujik et sa femme où là c’est basse-batterie-guitare. Y’a pas un seul clavier. Et depuis je crois que j’ai pas arrêté de fonctionner comme ça.

C’en est donc définitivement fini des synthés ?

Ouais. Parce qu’après Mustango, on avait fait une tournée de 84 dates avec que des synthés et des boîtes à rythmes, ce qui avait donné Muragostang, et là j’ai senti que j’étais un peu allé au bout des machines, donc c’était pas mal de revenir à la guitare. A des bases beaucoup plus simples.

Et moins sexuelles car les synthés vous conféraient un son, comment dire, très humide…

Oui, je vois ce que tu veux dire. C’est-à-dire que le son même du synthé est indiscret…

Comme il l’était chez Prefab Sprout, que certains de leurs fans critiquaient pour leurs sons clinquants, fleur bleue, sans se rendre compte que ça faisait partie de leur charme…

Oui, bien sûr. Des sons dont on s’est d’ailleurs rendu compte qu’aujourd’hui ils tiennent bien. Souvent les gens qui utilisent des sons de synthé un peu décalés résistent mieux à l’épreuve du temps que ceux qui sont piles poils dedans. Donc oui, les synthés sont indiscrets. Alors que les guitares non, c’est discret, pudique presque. Même une douze cordes. Là, sur le dernier, j’ai essentiellement joué d’une douze-cordes acoustique. Quand ça sonne électrique c’est juste que je la passe sur un vieux Fender 64. Je mets le jack dedans, je joue la douze et j’ai le son, c’est tout.

En France on n’en connait pas beaucoup de musiciens qui jouent la douze cordes…

C’est vrai. Mais ça c’est parce que les musiciens français c’est des branleurs. A chaque fois que j’ai vu un français jouer de la douze, le mec était là : « Oh la la, ça fait mal aux doigts ! ». N’importe quoi ! C’est très bien. Moi j’adore jouer de la douze avec des GROSSES cordes.

Et cette électricité induit un tout autre travail textuel. Dès qu’il y a de la guitare, électrique ou pas, on n’est plus dans le même registre d’écriture ni de chant qu’avec des synthés…

Ouais, ça change tout. La semaine prochaine je commence à répéter pour la scène et je me dis : « Comment je vais faire les titres de Grand Lièvre ? » Et je crois que je vais les faire comme je les faits à la maison avec ma douze acoustique. Quand je branche ma Telecaster sur un Fender d’un coup je vais ailleurs…

La guitare parle déjà…

Ça m’a plus sur le dernier de rester acoustique avec une douze et DE NE PAS DEROGER à ça et PAS UN UN CHORUS de guitare. T’as remarqué ? PAS UN CHORUS DE GUITARE. RIEN. Pas un riff. RIEN. Sauf sur le titre « Haute Arverne ». Là on était en studio, y’avait un vieux Fender incroyable qu’ils avaient remis à neuf. Il a un putain de son cet ampli. J’ai mis la Telecaster dedans et j’ai été obligé de le garder quoi. Mais pour les guitares, j’étais acoustique. Sans chorus. C’est peut-être ça qui a mis de la légèreté. C’est beaucoup plus simple, plus direct. Mais bon, ça prend du temps pour arriver à ça. Ça prend du temps. Vivement le prochain.

(SUITE.)

24 réponses
  1. yanko
    yanko dit :

    Excellent Sylvain ! Autre chose que les interviews routinières du mec, où il parle de tout sauf de son métier !

  2. pierrot
    pierrot dit :

    oui, belle discussion… dommage qu’il n’ait pas osé sortir sa 12 cordes sur quelques titres finalement lors de la tournée… peut-être au printemps! ( Même si ces concerts sont excellents )

    Pierrot surjeanlouismurat com

  3. sylvain
    sylvain dit :

    Bonjour Pierrot. Merci pour ce commentaire. L’interview aura une suite, donc à bientôt peut-être. Et comme je vois Murat cette semaine en concert je verrai bien s’il utilise la 12 cordes ou pas !

  4. pierrot
    pierrot dit :

    Ca m’étonnerait… il s’amuse trop avec sa telecaster… même si j’ai vu qu’il avait aussi en coulisse une guitare avec une caisse en bois et métal… Bon concert (je l’ai vu deux fois sur la tournée et ça envoit du lourd!)

  5. Nola Chérie
    Nola Chérie dit :

    Bien, bien…
    J’espère que toi aussi.
    Toujours jalouse pour l’interview de Christophe! (sourire)
    Dis-moi tu fais quand Saul Williams? (re-sourire)

  6. Sharlot Stoned
    Sharlot Stoned dit :

    et bien moi, je ne comprends pas, j’ai trouvé cela d’un chiant ce concert, (cf le trianon_paris) un JLM en robe de chambre, et malgré un bon son, mais quel ennui, la musique pfff, la gratte n’en parlons pas, l’orguer, au secours, j’ai tenu 4 chansons, c’est pourtant pas le genre de la maison, je m’arrange pour me rattraper à ce qui est sauvable, là, nada, le merch avec t shirts horribles m’a bien confirmé qu’il n’y avait là rien de rien pour moi…

  7. sylvain
    sylvain dit :

    Ouais, c’est vrai qu’au Trianon Murat a un peu enfilé le chaud-son de la chose (!) du coup ça sonnait un peu trop blues rock à papa (ZZ top m’a même dit mon pote) avec un clavier qui, en plus, virait parfois au trip Charlie Oleg ! Manset lui ne donne jamais de concert. Donc on saura jamais si ce sera aussi chiant live. Ce qui me gène pas : je suis plutôt disque que live.

  8. pierrot
    pierrot dit :

    Si vous n’avez fait que les 4 premières chansons… c’est dommage car la première partie est en effet moyenne… Il se réveille complétement dès qu’il entame Mousse Noire… Quant à ZZ top, on avait beaucoup évoqué ce groupe lors de la précédente « fournée »… Et JLM les aime bien!

  9. sylvain
    sylvain dit :

    Non, Pierre, je suis resté attentif bien au-delà de la première partie du concert, mais même quand il s’est mis à lâcher les chiens, à moins chanter et à être plus instrumental j’ai trouvé que ça roulait un peu des mécaniques à l’ancienne. Je suis juste pas fana fana de ce genre de son-là. Rutilant.

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